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Quelle puissance pour le projecteur ?

Quelle puissance lumineuse faut-il pour mon projecteur ? C'est la première question que se pose tout nouvel amateur de Home-Cinéma. Pour apporter une réponse intelligente, il faut faire un peu de physique. La lumière, on le sait depuis environ 1802 et les expériences de Thomas Young, est à la fois une onde et des particules. Les particules, ce sont des photons. Ces particules sont partout dans l'univers. Selon leur état d'énergie et leur longueur d'onde, elles sont de la lumière, ou des rayonnements beaucoup plus agressifs (par exemple des rayons X), ou des rayonnements inoffensifs comme le fond diffus cosmologique qui nous permet d'explorer l'univers dans le passé. Ouf, j'arrête là la physique ! On va parler à présent de flux lumineux, cela veut dire la quantité de photons en "état lumineux" qui viennent buter contre l'écran, et qu'on mesure en lumens.


Car oui, la lumière n'est visible que quand elle vient buter contre un obstacle qui peut la réfléchir. Dans l'espace de l'univers, la lumière n'est pas visible. Les photons filent dans tous les sens à 300,000 km/s, et on ne les voit pas. Sauf s'ils butent sur un obstacle capable de les réfléchir. Quand on regarde directement une source lumineuse, l'obstacle, c'est notre rétine. Attention, elle a une endurance limitée. Le Soleil nous envoie à peu près 100,000 lumens, et c'est beaucoup plus que ce que la rétine peut supporter. En fait, notre zone de confort se situe entre 0 et 5,000 lumens. Plus, il y a danger, et même 5,000, il ne faut pas trop rester exposé. D'ailleurs, beaucoup de nouveaux projecteurs laser incluent une détection de proximité et coupent le faisceau s'ils détectent une présence trop proche.


Donc regarder le Soleil en face, c'est prendre 100,000 lumens dans la rétine, et c'est la mort assurée de celle-ci. Mais quand la lumière du Soleil se réfléchit sur diverses surfaces, celles-ci absorbent une grande quantité de lumière, et la lumière réfléchie n'est plus qu'une petite fraction du flux initial. Par exemple, le plus vieil écran de projection connu sur Terre a environ 4,5 milliards d'années, il s'appelle ... la Lune. Plus ou moins éclairée la nuit par le Soleil, selon sa position par rapport à la Terre, la Lune réfléchit la lumière qu'elle reçoit de notre étoile. C'est à dire 100,000 lumens. Mais comme elle en absorbe l'essentiel, elle ne nous renvoie que moins d'un lumen, même en pleine Lune. Mais attention, s'il nous prenait la fantaisie d'aller la peindre en blanc, ça pourrait changer la donne !


Nous voilà dans le coeur du sujet. Pour que la lumière soit visible, il faut qu'elle soit réfléchie vers notre rétine. Sur une surface noire absolue, la réflexion est nulle. C'est un trou noir. La Lune ne renvoie que 0,2 ou 0,3% de ce qu'elle reçoit, mais ça la rend déjà bien visible. Peu lumineuse, mais bien visible, la nuit. Voilà une première information : dans le noir, un très faible flux lumineux peut être très visible. Mais dès qu'il existe une lumière ambiante plus forte, le flux le plus faible tend à devenir à peine perceptible. On peut apercevoir la Lune en pleine journée, mais elle n'est pas près de nous éblouir !


Fondamentalement, il n'y a pas de différence entre le projecteur Soleil et l'écran Lune, ou un projecteur Sony, JVC, Optoma, ou ce que vous voulez, et un écran Screenline. Si ce n'est les ordres de grandeur. La Lune et son demi-lumen est à peine visible en plein jour, c'est à dire au milieu de dizaines de milliers de lumens. Pas assez pour distinguer quoi que ce soit de précis, mais elle est quand même visible. La lumière de votre projecteur favori sera toujours visible sur votre écran préféré, même en plein jour, mais avec quelle précision ? Il faut situer les ordres de grandeur. Lumière du Soleil : 100,000; mais lumière indirecte, passant à travers des surfaces plus ou moins opaques, ou réfléchie sur des murs, etc. : que reste-t-il ? Il n'y a pas de cas général, que des cas particuliers. Soyons clair : face à un rayon de soleil direct tapant l'écran de projection, aucun projecteur ne pourra jamais rien, ce sera la Lune en plein jour. Mais si le rayon de Soleil tape sur un autre mur de la pièce, on va vite descendre à moins de 20,000. Avec un simple voilage, on descendra facilement en dessous de 10,000. Et si la lumière est indirecte, sans avoir besoin d'une occultation totale, on sera à moins de 5,000. Autrement dit, dans des conditions simplement normales, avec une occultation minimale, on devra faire face à quelque chose entre 1000 et 2000 lumens. Et dans une salle dédiée, c'est à dire obscure, on ne parle plus que de fractions de lumens, en fonction des possibles réflexions dans la pièce (mobilier, en ceintes, plafond...).


Mais que se passe-t-il quand le flux lumineux du projecteur se combine avec le flux lumineux ambiant ? Ce sont les contrastes qui vont souffrir en premier, c'est à dire la profondeur des noirs. On le comprend facilement : le projecteur peut bien s'évertuer à séparer les noirs avec un taux de contraste de 100,000:1 voire plus, si une lumière blanche (jaune) vient polluer le flux, c'est un rapport de force direct. 2000 lumens à 100,000:1 mélangés avec 2000 lumens à 1:1, ça laisse... pas grand chose, car la courbe n'est pas linéaire. Vous voyez bien l'image sur l'écran, mais elle est toute fade, sans aucun contraste, et les couleurs sont écrasées. C'est cela qu'il faut retenir : la courbe n'est pas linéaire. Alors 1800, 2000, 2200 lumens, ça ne change quasiment rien. Surtout que les lumens et les contrastes annoncés par les constructeurs sont parfaitement fantaisistes, et la mesure réelle est en général trois à quatre fois plus faible.


Résumons : dans une salle obscure, le projecteur fournira toujours assez de lumière, tout comme la Lune est bien assez visible avec son demi-lumen. Dans une salle faiblement éclairée, l'image sera bien visible, mais les contrastes seront totalement écrasés. Et dans une salle très éclairée ou en extérieur, ... on oublie, il faut passer à d'autres technologies.


Vous allez me dire : quand même, dans ma salle, je vois bien la différence entre un projecteur de 1800 lumens ou un autre de 3000; et aussi entre un écran blanc et un écran gris. C'est vrai. Mais c'est relatif. C'est à dire qu'en mettant deux projecteurs ou deux écrans côte à côte, on voit bien la différence. Sauf qu'en mettant un seul projecteur et un seul écran dans une seule pièce, l'oeil s'habitue très vite, et se satisfait parfaitement de la projection proposée, car elle dépasse toujours et de beaucoup les limites inférieures de la vision humaine. Donc ce qui compte réellement, c'est le contraste, beaucoup plus que la lumière, et trop de lumière ne peut avoir qu'un seul effet : fatiguer l'oeil plus vite. Il faut donc privilégier les toiles à contraste élevé.


Ah mais justement, si l'écran a un contraste élevé, il est gris et renvoie moins de lumière ! C'est vrai. Un écran blanc renvoie presque 100%, un écran gris peut renvoyer entre 50 et 70%, et un écran noir va renvoyer entre 0 et 1%. C'est comme ça, personne ne peut rien y changer. Alors il faut regarder les deux cas de figure. Dans une salle noire, avec un projecteur à 2000 lumens, l'écran gris renverra environ 1200 lumens, et c'est bien assez pour avoir une belle image bien contrastée. Dans une salle de vie, on va vite atteindre les limites basses. Et c'est pour cela qu'on a inventé les toiles "techniques" ou ALR. Ces toiles renvoient la lumière latérale vers les côtés. Du coup le flux du projecteur est moins pollué, et l'image devient bien plus visible que sur un écran blanc "normal". Encore une fois, 200 ou 400 lumens de plus n'auraient rien changé.


Oui, mais alors, dans ce cas, il vaut mieux un gain élevé ? Non, le gain n'a rien à voir avec la luminosité. Mais je vous laisse lire mon article précédent qui vous l'expliquera en détail.


Bon, alors la distance... ma salle fait six mètres, est-ce qu'on ne va pas perdre ? Allons, soyons sérieux. Les étoiles, dans le ciel, elles sont bien à des millions d'années lumières, non ? Et on les voit, la nuit, non ? Alors six mètres... Le problème de la distance, il peut exister, oui, il concerne la pixellisation. Et d'ailleurs, ce n'est pas la distance qui est en cause, c'est la taille de l'écran. Sur un écran de 4m de base, chaque pixel fera 2mm en full HD, et 1mm en 4K. Quelle que soit la distance de projection. Sur des gros plans, ça peut jouer. Patience, le 8K arrive...


Conclusion : le nombre de lumens du projecteur n'est pas un critère décisif. Il faut regarder le contraste, le rendu HDR, et toutes ces sortes de choses. Mais les lumens, c'est négligeable. D'ailleurs, si les fabricants n'en mettent pas plus, vous croyez sérieusement que c'est parce qu'ils ne peuvent pas en mettre plus ? Bien sûr que non. C'est parce qu'ils savent parfaitement que ça n'est pas utile.

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